26 Janvier 2018
Depuis que je suis petite, je sais que je ne veux pas allaiter... et la jeune femme que j'étais, ne le voulait pas non plus...
Je n'ai jamais bien compris pourquoi j'y étais ainsi opposée et puis finalement en creusant un peu l'idée, je pense que j'ai fini par comprendre deux ou trois petites choses : j'ai des souvenirs un peu flou de mes tantes qui allaitaient comme ça, au milieu de tout le monde, sans soucis et sans s'offusquer et je crois que ça m'a profondément choqué, du coup j'ai toujours associé allaitement avec déballage de tétons ! mais l'histoire me démontrera que finalement non ! puisque je n'ai jamais montré les miens ! ou tout en pudeur.
Je crois qu'au fond de moi, j'ai été marquée inconsciemment par ce non respect de l'intimité de chacun et du coup, ça me rebutait ! A l'époque (il y a 35 ans donc) avec le côté un peu baba cool en plus, montrer sa poitrine n'était finalement pas si grave que ça, et pour ma part, ça m'a imprégné ! je n'ai pas été élevée avec des tabous mais pour moi, allaiter c'était un truc entre la maman et son bébé, à la limite avec le papa. Personne ne se demande jamais si les enfants ont besoin de voir comment on donne à manger à un bébé ?! je ne sais pas trop, mais ça c'est un autre sujet qui ne se posera pas chez nous, je le rappelle ma fille sera fille unique (bouhhh les mauvais parents !).
Je pense aussi que j'ai été touchée par ce syndrome de la vache laitière ! J'ai beaucoup entendu les personnes qui sont contre (oui ça existe) nous dire que la femme n'est pas un biberon géant, et encore moins une vache qui nourrit son petit, que c'est à la limite de l'esclavage, qu'on est pas des bêtes... m'enfin en attendant, la nature fait bien les choses hein ! et ce n'est pas un hasard non plus. Je souris toujours quand j'entends les expressions Mère louve où Maman ours qui sont si bien considérées mais Maman vache c'est moins glamour c'est ça ?! mais pour le coup tellement plus dans la vraie vie !
Dès que je suis tombée enceinte, une des questions qui est revenue très très souvent a été de savoir si j'allais la nourrir... oh beh non je vais la laisser mourir de faim, après tout, moi mon job serait fait ! et oui, la nourrir sous entendait toujours : lui donner le sein.
Oh mais attendez, cela signifie donc, que si tu donnes à ton enfant du lait en poudre tu ne le nourris pas et donc que tu es une mauvaise mère ?! oh non mais pas du tout, nous ne sommes pas dans le jugement dans cette société, jamais ! (ironie quand tu nous tiens).
Bon je sais que j'enfonce un peu des portes ouvertes là mais je ne pensais vraiment pas que ce genre de remarques se faisaient aussi dans la vraie vie !
De quel droit les gens se permettent ils de nous juger sur quelque chose d'aussi personnel que l'allaitement ? tous les bébés sont différents et tous les allaitements le sont aussi finalement !
J'ai toujours crié à qui voulait l'entendre que je n'allaiterais pas, sans doute par provocation et surtout pour pouvoir débattre, comprendre, me faire ma propre opinion.
Je n'ai jamais jugé les mamans qui ne souhaitent pas allaiter, pour des raisons diverses et variées, c'est un choix lourd, fatiguant, contraignant alors autant l'assumer pleinement. Peu importe le choix que nous faisons, le jugement tombera à tous les coups ! peu importe si vous allaitez ou si choisissez le lait industriel.
Et puis il y a eu les questions sur le papa... le papa et l'allaitement oui oui ?! genre il a un droit de regard sur mon corps et donc son avis à donner... euh comment te dire que le papa à certes un avis à donner mais c'est quand même mon corps. Par chance, ma moitié a toujours été très claire à ce sujet : il est pour mais c'est mon corps, mes seins, mon intégrité.
Je me souviens que les cours de prépa à l'accouchement ont été très importants dans ma décision et après 4h à parler de ça, je me suis promis de tenter la tétée de bienvenue ! déjà je trouvais ça jolie et puis un peu moins violent pour elle, ne me demandez pas pourquoi, c'est ainsi, je trouvais et je trouve d'ailleurs toujours que c'est une jolie transition.
Et puis, elle est arrivée, ma merveille, je vous en parlais ici d'ailleurs ! bon je viens de relire mon article de l'époque et j'ai pleuré comme une madeleine !!! Bref !
J'ai donc tenté la petite tétée de bienvenue, avec bonheur, sans soucis et 0 appréhension, après tout, ça n'engage à rien... et puis là le déclic, en la voyant contre moi, j'ai relevé la tête et fait le choix d'allaiter, quelques jours, quelques semaines... finalement quelques mois. J'ai souri de mon ignorance, je me suis moquée de moi même... il faut toujours essayer avant de prendre une décision !
Ma décision est adoubée par l'équipe soignante... on m'explique qu'il n'y a rien de mieux, que c'est l'essence même de la maman, que c'est la quintessence de la femme, notre mission, notre devoir... bla bla bla ! Welcome dans la secte de l'allaitement ! c'est vraiment cette impression que j'ai eu, vraiment.
Une fois toutes les deux dans la chambre, une fois le papa rentré chez nous, je me suis retrouvée seule et désemparée face à ce bébé qui pleure, qui a faim et qui ne sait pas ou il est... le personnel m'a expliqué, rassuré et surtout montré comment la positionner, comment ne pas avoir mal, comment favoriser la montée de lait qui finalement n'est arrivée que le lundi ! quand je pense que je me demandais si j'allais la sentir, ah ah ah la bonne blague ! les seins en béton welcome dans le glamour !
J'ai ensuite passée 4 jours à apprendre comment bien faire, à favoriser la production de lait, j'ai eu le droit à me faire tripoter les seins par des tas de personnes du corps médical histoire de s'assurer que je gère bien, parce que évidemment si bébé a faim, c'est de la faute de la maman, le lait n'est pas assez ou trop ceci ou celà ! j'ai autorisé une nuit après des heures de larmes (pour elle et pour moi) à donner un biberon de lait tout prêt et quand j'ai vu ma fille s'endormir le ventre plein, je me suis dis que finalement elle n'aurait pas un allaitement.
Avec le recul, je réalise : mais quelle violence ! dans la gestuelle, mais aussi dans les propos ! je regrette tellement que le corps médical français ne soit pas mieux informé et surtout plus doux et compatissant, ! c'était sans compter la sage femme qui m'a carrément dit que l'allaitement c'est naze et que rien ne valait un biberon de lait industriel :)
Et puis, arrive le mercredi de la sortie et le verdict tombe : elle n'a pas repris assez de poids, on me garde un jour de plus ! et là, le désespoir ! vraiment, mais aussi et surtout la culpabilité, celle de ne pas nourrir ma fille correctement, celle de ne pas faire ce qu'il faut, celle de ne pas donner mon max...
Pendant les quelques jours en mater, j'ai continué mon combat : allaiter et puis si vraiment je n'y arrivais pas, faire un complément.. complément qui se faisait huer juste après par les autres infirmières. Ouverture d'esprit est le mot que vous cherchez :) on m'a dit que c'est de ma faute si mon allaitement ne marche pas, qu'il faut activer la montée de lait, à n'importe quel prix.
Finalement, je pense que j'ai eu 10 versions différentes de comment faire ou ne pas faire un bon allaitement ! avec le recul, je pense qu'il n'y a pas de bons ou de mauvais allaitements, il y a juste des mamans et des bébés.
Le mercredi, devant mon désarroi et les larmes, une sage femme décide de faire rentrer dans ma vie, dans nos vies, mon nouvel ami pour des mois : le tire lait ! moi qui voulait éviter de me prendre pour une vache laitière, j'ai atteint des sommets !
Je prends mon courage à deux mains, je m'installe, et là le miracle : je vois cet or blanc dans le biberon, je vois que je peux nourrir ma fille, c'est là c'est concret ! je pense que j'avais besoin de voir de mes propres yeux que j'ai ce qu'il faut pour elle.
J'insiste avec détermination, je rempli avec application mes biberons et je continue de lui donner le sein aussi... Je n'ai pas aimé allaiter ! voilà c'est dit ! et pourtant, j'ai tenu 8 mois. J'ai aimé la sentir contre moi, la voir en extase lactique, mais finalement je ne le sentais pas. Attention, le tire lait ce n'est pas non plus une partie de plaisir hein ! c'est parfois douloureux, long, bruyant, et puis il y a aussi toutes les petites joies de l'allaitement avec les seins qui s'engorgent et les petits bobos qui vont avec.
J'ai testé l'allaitement au sein directement, l'allaitement avec un bout en silicone et puis au bout de 2/3 mois, je suis passée au tire allaitement. L'idée était simple : même si je ne me sens pas à l'aise avec l'allaitement classique, je voulais quand même donner le meilleur à ma fille, aussi j'ai tire-allaité durant des mois, le jour, la nuit, en rentrant de soirées, en thalasso, devant la tv, avant de me coucher, dès que j'avais 15 minutes, malgré la fatigue, malgré les nuits à l'arrache, malgré tout, envers et contre tout et tous.
Tu tires allaites ?! tu quoi ? m'enfin c'est quand même mieux de mettre bébé au sein... je l'ai fait, j'ai luté contre moi, contre mon sentiment d'être une mauvaise mère et puis j'ai compris que l'allaitement ne me plaisait pas, que je pouvais passer des heures avec elle contre moi mais pas pendu à mon sein. J'ai aussi compris que ça ne faisait pas de moi une mauvaise maman, je suis comme je suis, peu importe. Je sais aujourd'hui que je ne regrette rien, rien de rien ! Ma fille va bien, elle a profité de mes vitamines, de mon lait et de mon immunité durant des mois... et puis, un jour, j'ai décidé de stopper doucement mais surement... l'introduction des aliments m'a aidé et quand j'ai complètement arrêté, j'ai été soulagée et fière. Soulagée de ne plus être tributaire de mes seins et fière d'avoir tenu si longtemps, comme ça, en étant persuadée de faire au mieux pour elle et puis pour moi aussi.
Je n'ai trouvé que peu de témoignages de cette méthode et pourtant, est elle plus mauvaise qu'une autre ?! peut on juste choisir de s'écouter ? de faire comme bon nous semble ? Je rédige cet article pour ça aussi, si une seule femme relève la tête grâce à mes mots, alors ma bataille est gagnée ! j'aurais aimé lire ces quelques lignes quand je me posais toutes ces questions.
J'ai même téléphoné à l'époque à la célèbre Leche league et là, le verdict est sans appel : on ne peut pas allaiter des mois juste en faisant du tire allaitement ! la production de lait va s'arrêter très rapidement, en quelques jours...
euh mais alors dites moi les co*****es j'ai fait quoi moi pendant tous ces mois ?! parce que finalement, ma fille a grandit avec mon lait, juste avec lui ! bien sûr, elle n'a pas été en contact avec mes seins après ses 3 mois mais elle a été en contact avec son papa qui a adoré lui donner ses biberons :)
Attention, je ne porte pas de jugements et je crois que j'ai mis autant de temps à écrire cet article à cause de ça justement, à cause du jugement des autres... de celles qui ont allaité 1 an, 6 mois ou 5 ans sans une aide, à celles qui n'ont pas allaité, aux autres qui aiment ça, et à tous les autres finalement.
Je souhaite juste témoigner que l'allaitement est un choix, le choix d'une femme, d'une maman mais un choix malgré tout. On ne doit pas culpabiliser de faire ce qui est bon pour son bébé et surtout pour soit, ne pas s'oublier, surtout ne pas s'oublier.
Je pense que si nous n'avions pas eu de soucis avec sa prise de poids et cette journée en plus à la maternité, je n'aurais pas eu ce besoin de contrôler ce qu'elle mange, tous les jours.
Avec mon tire lait, je savais ce que ma fille prenait tous les jours, j'ai tout noté dans un cahier, pendant des mois... je suis retombée dessus récemment et whaou le choc ! pourtant je ne regrette rien et je suis fière de mon parcours, atypique mais bénéfique malgré tout.
Aujourd'hui, je sais que tant que l'on a pas à faire ce choix réellement, on peut changer d'avis n'importe quand, juste grâce à cette petite chose merveilleuse qui est le libre arbitre !
Le principal pour un bébé finalement, c'est l'amour non ?!